Une dizaine de caricaturistes de presse ont exposé vendredi et samedi à Kinshasa, au Musée National de la République démocratique du Congo pour une exposition de leurs œuvres autour du thème : «30 ans après, que veut le peuple, la démocratie ou la dictature éclairée ? ». Cette exposition est le fruit d’un atelier tenu récemment, entre jeunes dessinateurs et leurs aînés, en guise de transfert de compétences.
Placées sur des back drop, les œuvres de chacun des artistes dessinateurs se rapportent à une époque précise de l’histoire de la RDC depuis 1990, avec l’avènement du multipartisme par le président Mobutu Sese Seko. La réflexion est de savoir si la démocratie vaut la peine pour le développement d’un pays comme la RDC ou bien une dictature dite éclairée.
Des sujets tels que la dictature, la démocratisation, le multipartisme, le débat national, la mort du président Laurent-Désiré Kabila, les élections, le dialogue inter-congolais, l’accord de Saint Sylvestre, le procès 100 jours, la gratuité de l’enseignement, le retour des reliques de Lumumba ou encore la guerre contre le M23 sont évoqués en dessins caricaturés. Ces dessins sont également catalogués dans un livre qui a été distribué lors du vernissage.
Plusieurs dessinateurs ont pris part à cette exposition notamment Thembo Kash, Fortuna Muko, Amisi Ndrabu, Fidèle Kenda, Alber Luba, Corneille Kalamba, Emmanuel Nkwe, Rodrigue Muladika, Serge Mandinda, Valery Matensi, Patou Bomenga, Kalundende, Dick Essle, Merveid Pontshi, Claude Gwenia, Jean-Pierre Mwange, Sébastien Enga, Phillipe Mwabi.
Ce projet de formation des caricaturistes de presse est porté par l’Association des Dessinateurs de Presse (ADEP) que dirige Kash Thembo et vise à professionnaliser les dessinateurs afin de susciter des vocations, intéresser un grand nombre et participer positivement à la démocratie.
Kash Thembo est brièvement revenu sur la différence entre la bande dessinée et le dessin de presse. La bande dessinée, dit-il, est une technique qui consiste à raconter une histoire par une succession d’images, on a suffisamment d’espace. Alors que la caricature qui est un secteur du dessin de presse, est une expression satirique. Elle n’a généralement qu’une seule case et exprime beaucoup de choses.
« La démocratie, 30 ans après n’a pas encore existé »
Lors des échanges qui ont précédé le vernissage de l’exposition, Mfumu Toto, doctorant en sciences politiques, a estimé que 30 ans après la démocratisation, l’individu congolais n’est pas libre de penser, d’agir et de s’organiser sans nier les avancées de cette dernière décennie. La classe politique a fait autres choses que la politique au point que le Congo a le problème d’hommes, de culture et d’organisation politiques, a-t-il ajouté.
« La démocratie, 30 ans après n’a pas encore existé. Ayons le courage de le dire. Parce que la démocratie de la constitution est moins importante que celle de la culture. Nous n’en avons pas la culture. Si on a des démocrates, même sans la démocratie dans la constitution, le pays sera bien dirigé », a-t-il dit.
Le professeur émérite, Yoka Lye Mudaba, a pour sa part estimé que la RDC a manqué des rendez-vous dans son histoire. De l’accession de Mobutu au pouvoir et la valeur du cuivre à l’époque ; de la prise de pouvoir de Laurent Désiré Kabila et la quête de la démocratie qu’il dit interminable.
« Nous sommes rentrés dans la quête d’une démocratie introuvable. Une démocratie difficile à identifier. Il est temps de penser autrement, d’agir autrement, d’écrire autrement, de décider autrement, de chanter autrement, de vivre autrement. Les députés, les dessinateurs, professeurs, notre rôle, c’est de dire la vérité, rien que la vérité », a-t-il détaillé.
Emmanuel Kuzamba