Des cinéastes congolais ont interpelé les autorités congolaises sur le rôle de « médiateurs » qu’elles devraient jouer entre les artistes congolais et les institutions internationales, quelques jours après le refus par la Maison Schengen de délivrer le visa au réalisateur Kevin Mavalaka pour se rendre au festival de Cannes en France, et le silence de Kinshasa.
Jeune réalisateur de 25 ans, Kevin Mavakala était invité à se rendre au festival de Cannes où son film « La star » a été sélectionné à la 75è édition de ce rendez-vous cinématographique annuel qui se tient du 17 au 28 mai 2022. Film comique, ce court métrage raconte l’histoire d’un réalisateur qui fait de son mieux pour la réussite de son tournage mais est tombé sur une actrice très capricieuse, qui ne lui facilite pas la tâche.
La Maison Schengen de Kinshasa, sorte de consulat européen géré par Bruxelles, ne lui a pas délivré le visa, ce qui a suscité la colère et l’indignation dans le secteur cinématographique congolais, allant des simples déclarations à l’annulation par Ciné-club de Kinshasa de la projection du film « Servant », une collaboration qui était signée dans le cadre du festival du film européen.
Les cinéastes qui se sont confiés à Mbbactu, ont pointé du doigt la responsabilité du gouvernement de la RDC avant de formuler quelques recommandations pour palier au problème de refus d’octroyer de visa aux cinéastes congolais par des chancelleries occidentales qui, selon eux, commence à devenir « récurrent ».
On n’a pas besoin des « millions pour redorer l’image de l’artiste. Le ministère (…) a le pouvoir de jouer le médiateur entre les artistes et beaucoup d’institutions, surtout internationales, qui ne nous respectent pas », a déclaré à mbbactu Tshoper Kabambi.
« Notre Etat ne nous considère pas »
Pour sa part, le réalisateur Henoc Kiyombo assimile ce refus d’octroyer le visa à un manque de considération envers les cinéastes aussi bien par les institutions internationales que par les autorités de la République démocratique du Congo.
« C’est un problème de notre gouvernement qui ne nous considère pas. Si nous étions considérés, le gouvernement ou le ministère de la Culture allait faire quelque chose pour [décanter] cette situation. C’est tout le contraire que nous sommes en train de voir », a-t-il déploré.
Selon les informations recueillies par mbbactu, le document qui a fait défaut au dossier de Kevin Mavakala c’est la lettre du ministère de la Culture, arts et patrimoines de la RDC lui reconnaissant le statut d’artiste (réalisateur).
A cela s’ajoutent l’absence des relevés bancaires, la preuve des liens familiaux en RDC, les conditions de séjour pas justifiées. Ces éléments ont laissé entrevoir des doutes sur le fait qu’il pouvait quitter le territoire des Etats-membres avant l’expiration de son visa, peut-on lire sur la lettre (réponse) de la Maison Schengen de Kinshasa à l’intention de M. Mavakala.
Dans ce contexte, la lettre d’invitation de l’agence culturelle africaine et l’accréditation obtenue pour la 75ème édition de ce festival, n’ont pas suffi à faire changer d’avis la Maison Schengen.
Le réalisateur Tshoper Kabambi est formel : la faute incombe « à notre Etat qui ne nous considère pas et qui fait en sorte que les gens ne nous respectent pas » il en est de même de « l’inexistence et l’inaction du ministère de la Culture et des arts (…) qui nous laisse nous débrouiller tout seul. Nous déplorons cette négligence ».
Emmanuel Kuzamba